jeudi 31 décembre 2009

un cas type de souvenir d'une vie passée

Le cas de Shamlinie Prema

Shamlinie Prema est née à Colombo, Sri Lanka, le 16 octobre 1962. Ses parents vivaient à Gonagela, à 60 kms au sud de Colombo. C'est là qu'elle fut élevée. La première chose qu'elle manifesta avant de savoir parler fut une peur terrible de l'eau.
Quand on voulait lui faire prendre un bain, elle résistait de toutes ses forces en hurlant. Elle avait aussi très peur des autobus, criait et pleurait si on devait l'y faire monter, et même en les voyant passer.
Etonnés de son comportement, ses parents pensèrent assez tôt qu'il pouvait s'agir d'un souvenir tragique d'une autre vie. effectivement, dès qu'elle sut parler, elle raconta des épisodes de son ancienne vie et surtout sa mort.
Cela se passait à Galtudawa (à 2kms environ de Gonagela). Elle disait "ma mère de Galtudawa" et parlait de ses soeurs et de deux compagnons d'école. Elle décrivait une maison notablement différente de celle qu'elle habitait à Gonagela.
Voici, d'après ses parents le récit de sa mort : "Un matin avant l'école, elle était sortie pour acheter du pain. La route était inondée. Un bus passa en l'éclaboussant et la fit tomber dans une rizière. Elle cria "Maman" en levant les bras et "tomba endormie". Les parents de Shamlinie ne firent pas tout de suite le rapprochement avec un terrible accident qui s'était produit le 8 mai 1961 : une petite fille de onze ans Hemaseelie Guneratne habitant Galtudawa et parente éloignée des Prema (bien qu'il n'existât aucune relation entre les deux familles), s'était noyée dans des circonstances exactement semblalbles à celles du récit de Shamlinie.
Un jour, Shamlinie reconnut un cousin de Hemaseelie, dans une rue de Gonagela. Elle avait trois ans. Un an plus tard elle reconnut les soeurs de la petite fille noyée, également à Gonagela.
Shamlinie avait déjà demandé qu'on l'emmène voir sa "mère de Galtudawa", qu'elle comparait à sa mère actuelle, au détriment de cette dernière. Enfin, son père accepta de rendre visite aux Guneratne.
Elle rendit visite encore plusieurs fois aux Guneratne, mais, peu à peu, à mesure que ses souvenirs s'estompaient, elle y alla de moins en moins, en parla de moins en moins et à onze ans, en 1973, elle semblait avoir tout oublié.
Sa phobie de l'eau était guérie depuis l'âge de quatre ans et à huit ans, elle n'avait presque plus peur des autobus.

Ian Stevenson -
Les enfants qui se souviennent de leurs vies antérieures

mercredi 30 décembre 2009

Ou trouve-t-on le plus de cas de réincarnation ?

Certaines parties du monde se prêtent plus que d'autres à la découverte de cas. Ce sont l'Inde (du Nord), le Sri Lanka, la Birmanie, la Thaïlande, le centre-sud de la Turquie, le Liban, la Syrie, l'Afrique occidentale et les régions nord-occidentales des Etats Unis.

J'ai trouvé également — et étudié — de nombreux cas en Europe et en Amérique du Nord (à part les tribus indiennes des régions du nord-ouest). j'en ai trouvé aussi en Amérique du Sud mais en moins grand nombre.

Le Tibet doit avoir été un foyer de nombreux cas, si j'en juge par ceux que j'ai rencontrés parmi les réfugiés tibétains qui vivent aujourd'hui en Inde. Mais les familles sont tellement dispersées qu'il est difficile de rassembler les témoins indispensables à nos enquêtes.
J'ai des raisons de croire que nous pourrions avoir un vaste champ d'études au Japon et au Laos, au Cambodge et au Vietnam. Mais le temps m'a manqué et j'ai dû limiter nos recherches aux pays dont j'ai appris à connaitre la culture.

Comme je l'ai déjà mentionné, il y a beaucoup plus de cas en Occident (Europe et Amérique du Nord) que ne l'imaginent les Occidentaux. En outre, nous avons trouvé plusieurs cas en Asie parmi les peuples dont la religion rejette l'idée de réincarnation (par exemple les chrétiens du Liban et du Sri Lanka et les musulmans sunnites de l'Inde).

Nos travaux dépendent entièrement des gens qui nous contactent pour nous signaler des cas, dont un certain nombre ne sont observés qu'à l'intérieur du cercle familial et des amis du sujet : il s'agit là généralement d'un parent décédé dont la personnalité semble s'être réincarnée dans son propre foyer. c'est ce que j'appelle un cas "privé".

Il y a également un nombre (non recensé) de cas étouffés dans l'oeuf par les gens qui ne croient pas à la réincarnation. Les parents pensent que l'enfant raconte des sottises ou des mensonges et lui imposent silence. Mais le cas se produit aussi dans les familles où la réincarnation constitue l'essentiel de leurs croyances. Par exemple, en Inde ou en Birmanie, la tradition veut qu'il soit mauvais et même dangeureux pour un enfant d'avoir des souvenirs de sa vie précédente. Ou bien les parents ont une raison de vouloir cacher des affaires de famille dont l'enfant semble se rappeler, ou encore c'est le comportement de l'enfant qui dérange. Si l'enfant se prétend d'une caste supérieure, il humilie ses parents ; si on contraire il se dit d'une caste inférieure, il les gêne, voilà des circonstances où l'on fait taire l'enfant.//

Lorsque le cas n'est ni privé, ni tu par la famille, il arrive qu'il soit porté à ma connaissance par l'un de mes nombreux collaborateurs à travers le monde, qui me servent également d'interprètes. //

Au début de mes enquêtes, je dépendais uniquement de la presse pour me renseigner. Je suis certain que la fréquence des cas est bien supérieure à celle des rapports dans la presse. Dans les pays où je suis aidé par des personnes qui s'intéressent à nos recherches, nos schémas géographiques révèlent une densité de cas inconnus du public.

Extraits de l'ouvrage de Ian Stevenson :
"Les enfants qui se souviennent de leurs vies antérieures."

samedi 19 décembre 2009

Renaissance ou réincarnation ?


Afin de tenter d’appréhender quelque peu cette difficile question de la réincarnation — qui représente pour les Hindous et la majorité des Bouddhistes une perspective indiscutée —, il est possible de trouver une analogie dans ce qui se produit quotidiennement dans la vie de tout être humain, et que celui-ci tient généralement pour un fait allant de soi. En effet, chaque nuit, lorsqu’il sombre dans son sommeil nocturne, ne subit-il pas à son insu— sans que d’ordinaire il le regarde comme tel — un genre de petite mort répétée ? Et, lorsqu’il se réveille le matin et ouvre de nouveau les yeux sur le monde manifesté, n’est-il pas, en quelque sorte, réincarné ?
On peut ainsi affirmer que, déjà de son vivant, il passe à travers un nombre — néanmoins limité — de petites morts et de réincarnations jusqu’à ce qu’arrive l’heure critique de son départ de ce monde où il lui sera ordonné de laisser derrière lui l’existence phénoménale qu’il ne lui aura été permis de connaître que pour un temps déterminé.

Et pareillement, peut-être le nombre de réincarnations possibles pour un être humain est-il aussi limité que celui des jours et des nuits qu’il est destiné à vivre durant son séjour temporaire sur ce globe. Toutefois, la réincarnation est-elle — comme on le croit en Asie — un droit pour tous ?

Ne doit-on pas s’interroger sur ce qu’il adviendra de celui qui ne cherche pas, de toutes ses forces, à diriger son intérêt dans une direction précise qui ait une valeur spirituelle — ou du moins artistique —, de façon à laisser en son être une trace suffisamment durable et profonde, capable de traverser l’oubli de la mort ?
Autrement dit, si sa vie ne s’est déroulée — comme c’est le cas pour la majorité des hommes et des femmes — qu’en réaction machinale à des conditions extérieures qui, de par leur nature, ne peuvent qu’être en perpétuel changement, et que rien de permanent ne s’est implanté en lui qui puisse appeler une nouvelle naissance, une réincarnation peut-elle être envisageable pour lui ?

En revanche, certains êtres, qui, en raison de la durée trop brève de la vie humaine, n’ont pu mener à son terme le travail spirituel qui était vital pour eux, seront contraints de revenir à l’existence phénoménale pour pouvoir achever ce qui a été commencé jadis et que la mort a interrompu prématurément.

Aussi, s’il se donne la peine de réfléchir à ce qui vient d’être expliqué, l’aspirant ne doit-il pas se demander s’il est réellement prêt à se vouer avec le tout de lui-même à sa quête ? — en d’autres termes, à tout faire pour “atteindre l’autre rive” ou pour devenir un “élu”, ce qui doit être le but de tout chercheur sérieux ?

Compte tenu de la confusion qui règne dans l’esprit des gens au sujet d’un domaine si difficile à embrasser, il s’avère des plus importants pour un aspirant de comprendre la différence existant entre renaissance et réincarnation.

Dans le premier cas, le retour à la vie n’est, par le principe de causes et d’effets, que le produit spontané de forces engendrées par des tendances et agrégats psychiques qui subsistent après la mort d’un individu et qui se recombinent à d’autres, de façon plus ou moins aléatoire, pour former un nouvel être qui leur fournira le terrain et les conditions d’existence leur permettant de se manifester à nouveau.
Il s’agit là d’un processus automatique, sans choix possible.

La réincarnation quant à elle ne peut se produire que pour un adepte qui est suffisamment avancé — que les Tibétains appellent un tulku * — et dont les efforts assidus qu’il a fournis dans le passé ont implanté en lui une impulsion qui donnera une direction déterminée à sa nouvelle vie, afin que, comme dit précédemment, il puisse poursuivre la tâche spirituelle déjà entreprise, mais qui était demeurée inachevée. Dans ce cas, la loi qui détermine cet événement fournira les conditions nécessaires à son actualisation.



Si un chercheur rejette a priori la possibilité de la réincarnation et n’envisage qu’une vie unique où son destin se joue de façon irrémédiable, il peut se sentir accablé en constatant à quel point il est loin des efforts qu’ont fournis de grands mystiques. Aussi, au lieu de se lancer, avec toute sa sincérité, dans le processus — qui ne peut qu’être douloureux — de la transformation de lui-même par des efforts spécifiques destinés à implanter en son être la semence nécessaire pour l’aider dans une existence future, il risque de rester tel qu’il est, en attendant passivement qu’un miracle se produise en sa faveur.

En effet, comme il ne peut trouver d’explication satisfaisante à l’écart qui existe entre les capacités des individus et que, par ailleurs, il a pu apprendre que le destin de certains grands mystiques a basculé soudainement lors d’une expérience spirituelle spectaculaire, apparemment inattendue, au lieu d’en déduire que des événements qui surviennent aussi mystérieusement dans la vie d’un homme ne peuvent qu’être le fruit d’un travail spirituel assidu entrepris dans d’autres existences, il est contraint d’attribuer de telles différences de destinée au choix arbitraire d’une puissance supérieure ; il ne peut alors qu’espérer profiter un jour, lui aussi, du bon vouloir de ce Dieu situé quelque part dans l’Univers et jouant aux dés les gagnants d’un jeu cosmique !

Il arrive parfois que, dans des moments d’intense présence à lui-même, un chercheur puisse accéder à d’autres plans de conscience lui permettant de connaître, d’une façon inexplicable par la logique de ce monde, toutes les possibilités d’un être vivant, d’une situation ou d’une chose en même temps. Il en est ainsi pour la réincarnation ; elle peut être saisie dans sa globalité à des moments privilégiés, par une soudaine perception directe qui dépasse la compréhension ordinaire.
Mais, vu la complexité d’une telle question — dont toutes les faces ne peuvent être appréhendées qu’à la suite d’un travail spirituel intense et non par des raisonnements intellectuels au niveau de la conscience coutumière —, lorsque l’on veut essayer de communiquer quelque chose de cette connaissance indéfinissable avec des mots, on se trouve confronté à une difficulté quasi insurmontable.
Il faut que le chercheur se refuse à nier en bloc ce phénomène ou à accepter aveuglément des doctrines toutes faites à propos d’un sujet aussi vaste et troublant, et qu’il tente de découvrir, au travers de ses propres pratiques de méditation, les réponses appropriées à ses besoins du moment pour l’aider dans cette difficile quête de la Source Sainte d’où il a émergé et dans laquelle il sera réabsorbé après sa mort.

*Il faut toutefois préciser que ce phénomène n’est pas propre aux Tibétains et qu’il peut s’observer à toutes les époques et dans tous les pays à propos de grands mystiques, comme Thérèse d’Avila ou Ramana Maharshi — ou même parfois de grands artistes (tels Mozart et Beethoven).

Salim Michael
S'éveiller, une question de vie ou de mort

lundi 7 décembre 2009

Quand A devient-il B ?

Le Canon bouddhique tient que l'être intermédiaire, la conscience de renaissance s'incarne au moment de la conception. La plupart des cas observés confirment ou ne s'opposent pas à cette conception. Toutefois d'autres possibilités semblent se rencontrer.
Déjà dans l'antiquité grecque, on discutait pour savoir si l 'âme s'incorporait à la conception ou lors de la naissance ; pour les Druses du Liban, le décédé s'attache au nouvel être au moment de la naissance seulement.
Stevenson a observé dix cas dont les dates vérifiées "font supposer que le décédé a bien pris possession d'un corps déjà vivant. Il en a publié deux cas seulement. Celui de Chaokhun Rajuthajarn décédé un jour après la naissance de l'enfant de sa soeur à laquelle il apparut après l'accouchement et dont il se retrouva le fils. L'intérêt se renforce du fait qu'il est devenu un très respectable abbé d'un monastère théravadin en Thaïlande et a autorisé la publication de son histoire bien qu'en apparence, elle contrevienne aux textes canoniques. Il existe aussi des cas où, si l'on encroit les dates, l'habitation du foetus s'est faite au cours de la grossesse à des dates variables.../

Dans les phénomènes du type réincarnation, la nouvelle personnalité s'installe définitivement et sans concurrence, quelle que soit la période de la grossesse ou de la petite enfance où elle débute. Dans les phénomènes du type possession, qui surviennent plus tard et jusqu'à l'âge adulte, la survenue de la nouvelle personnalité est partielle ou de courte durée..../

Il semble, si l'on en croit Stevenson, que tous les cas intermédiaires existent entre la possession typique, temporaire et partielle, et la réincarnation, complète et permanente, survenant dès la conception. De même qu'existent tous les intermédiaires quant aux dates de la vie embryonnaire ou post-natale à laquelle s'effectue l'habitation du nouveau corps.../

Tout ceci peut paraitre fantastique à l'Occidental moyen, car même s'il accepte l'idée d'un psychisme relativement indépendant du corps, il lui attribue une fonction privilégiée, sans doute issue du concept de l'âme regardée comme irremplaçable et unique. Les conceptions orientales pluralistes sont plus à l'aise sur ce point pour rendre compte des phénomènes.

Jean Pierre Schneztler De la mort à la vie.

mardi 24 novembre 2009

Comment s'opère le choix d'une nouvelle incarnation ?


Avons-nous le choix ?


Si le choix délibéré caractérise sans doute les boddhisattvas qui reviennent par compassion et lucidement, l'être ordinaire semble plutôt agir sous la contrainte. C'est l'enseignement général des traditions orientales, mais aussi de notre antiquité. Dans le mythe d'Er qui termine La République, Platon nous dit que le spectacle des âmes choisissant leur condition inspirait la pitié et se montrait risible "car c'était le plus souvent en rapport avec les conditions concrètes de leur vie antérieure qu'elles faisaient leur choix".
Seul le prudent Ulysse "dépouillé de son ambition" choisit sagement. C'est là l'essentiel des conseils du Bardo Thodol : "Il te faut demeurer dans la grande équanimité dépourvue d'attachement et d'aversion."

D'évidence, les sujets de Stevenson sont mûs par leurs désirs, déterminés par leurs samskaras et vasanas suivant les expressions orientales, c'est-à-dire les dynamismes formateurs qui imprègnent le psychisme et survivent à la mort.

Dans les vingt cas qui se souviennent de leur "bardo", la majorité semble se déterminer par un désir immédiat et non réfléchi et le processus de la renaissance s'accomplit lors d'une perte temporaire de conscience.
On a dans bien des cas l'impression d'une renaissance à n'importe quel prix, à la première occasion, dans des conditions apparemment défavorables. Le net raccourcissement de l'intervalle entre mort et renaissance, dans les cas de mort violente ou prématurée, témoigne fortement en faveur de la puissance efficace du vouloir-vivre, surtout lorsque celui-ci est stimulé par le sentiment d'un "travail non terminé" suivant l'expression de Stevenson.

Les attachements et les croyances s'avèrent hautement déterminants et s'illustrent dans les liens existant entre les familles du défunt et de ce qui renait.

Sur un total de 702 cas provenant de 10 cultures, les deux familles d'origine étaient apparentées dans 46 % des cas, en relation dans 31 % et inconnues l'une à l'autre dans 23 %.

Stevenson a recueilli le témoignage de 26 paires de vraies jumeaux pour lesquels les personnalités antérieures des deux protagonistes avaient été élucidées. Il est tout à fait remarquable que dans dix-neuf cas, il s'agissait, soit d'anciens époux, soit de frères ou soeurs ou parents. Dans les sept paires restantes, on rencontrait des amis ou des relations, jamais d'étrangers.

Dans les sociétés rurales, la "renaissance " dans le même cercle géographique étroit devrait contribuer à la permanence des caractéristiques sociales. Inversement, les renaissances "transculturelles" dont on trouve quelques cas, renforcent des influences déstabilisatrices ou enrichissantes, des brassages de population. On saisit sur le vif, l'un des modes d'action du "karma collectif"

Extraits de l'ouvrage de Jean Pierre Schnetzler: "De la mort à la vie." �

mardi 17 novembre 2009

Marques physiques et réincarnation

Quelques-uns des enfants examinés par Stevenson présentaient des marques sur la peau ou étaient affligés de malformations congénitales décrites comme des stigmates en relation avec leur vie passée. Ils étaient supposés correspondre, plus ou moins nettement d'ailleurs, à des blessures, cicatrices ou autres particularités physiques que le parent dont l'enfant se disait la réincarnation aurait présenté de son vivant, voire, s'agissant de blessures mortelles, aux derniers instants de sa vie.

Lorsque les stigmates sont visibles dès la naissance n'y a-t-il vraiment d'autre choix que d'invoquer la réincarnation ou, pour les plus sceptiques, le pur hasard ?

Le cas de Ravi Shankar, un petit indien, est particulièrement intéressant car on y trouve nombre des éléments en faveur de l'hypothèse d'une vie antérieure. Stevenson affirme qu'il fut capable de reconnaître les hommes qui le tuèrent, à l'âge de six ans, lorsqu'il s'appelait Ashok Kumar. Témoignage tout à fait extraordinaire car les vérifications indiquèrent que ses allégations étaient fondées : les faits se déroulèrent exactement de la façon dont il les avait relatés. Il se souvint que ses meurtriers l'exécutèrent à l'arme blanche et, entre autres mutilations, le décapitèrent.

Dans son existence actuelle son corps conservait ce qui pouvait apparaître comme un stigmate de cette affreuse blessure : " Sa mère certifia qu'il avait une marque rectiligne en travers du cou, semblable à la cicatrice d'une blessure faite par un grand couteau. Elle déclara s'en être aperçue pour la première fois quand son fils avait trois ou quatre mois. C'était apparemment congénital. Quand Ravi Shankar parlait du meurtre, il attribuait cette trace sur son cou aux blessures du crime. Au fur et à mesure qu'il grandissait, celle-ci changeait de place. En 1964, elle était en haut de son cou, juste au-dessous du menton, et s'était quelque peu estompée. "

Le cas de Corliss Chotkin Junior évoque également le phénomène des stigmates. Son grand-oncle, Victor Vincent, avait annoncé à sa nièce, environ un an avant sa propre mort, qu'il reviendrait sous les traits de leur futur enfant. On notera en passant que cet exemple pourrait être interprété dans le cadre d'une autosuggestion maternelle.

" Je vais revenir, je serai votre prochain fils. J'espère que je ne bégaierai pas autant que maintenant. Votre fils aura des cicatrices. " Il enleva alors sa chemise et lui montra une cicatrice dans le dos, provenant d'une opération subie quelques années plus tôt.

Dix-huit mois environ après la mort de Victor Vincent sa nièce mettait au monde un garçon, Corliss Chotkin, qui portait effectivement deux marques sur le corps de même forme et, grosso modo, au même emplacement que son grand-oncle décédé. Très tôt, dès qu'il fut en mesure de se faire comprendre, il reconnu et nomma différentes personnes qui composaient l'entourage du vivant de celui-ci.

Stevenson ajoute que " Victor Vincent bégayait beaucoup et il avait exprimé le voeu de moins bégayer dans sa nouvelle vie. Corliss bégayait énormément dans sa jeunesse et cela dura jusqu'à ce qu'il suive, à l'âge de dix ans, un traitement avec un orthophoniste. Il n'avait plus de défaut de prononciation lorsque je l'interrogeai. "

Enfin, le cas de Wijeratne au Sri Lanka, ne manque d'intriguer lui aussi. Il présente à sa naissance, en 1947, une nette difformité au niveau du thorax et au bras droit ; ce que sa famille interprète comme une conséquence karmique. Dans ce témoignage on relève que la réincarnation intervient assez tardivement, près de 19 ans après le décès, contrairement à la norme énoncée par Stevenson.

Le père de Wijeratne nota également certaines ressemblances avec son frère défunt, Ratran Hami. Wijeratne avait comme lui le teint mat alors que ses autres frères et soeurs avaient plutôt la peau claire. Son père, observant d'autres similitudes de physionomie entre son fils et son frère, déclara à sa femme : " Mon frère est de retour. " Celle-ci ne semble pas avoir prêté grande attention à cette remarque et aucun des deux ne fit le lien entre la difformité du garçon et Ratran Hami.

Vers l'âge de deux ans, deux ans et demi, Wijeratne commença à marcher autour de la maison en parlant tout seul. Son comportement intrigua sa mère qui écouta ses propos. Elle le surprit en train de dire que son bras était difforme parce qu'il avait tué sa femme dans sa vie précédente. Il cita de nombreux détails en rapport avec un crime dont elle n'avait, jusqu'alors, jamais entendu parler. Elle questionna son mari et H. A. Tileratne Hami confirma l'exactitude de ces propos : son jeune frère avait été exécuté en 1928 pour avoir assassiné sa femme.

Le père de Wijeratne tenta de dissuader son fils de parler de sa vie antérieure. Pourtant l'enfant persistait, souvent seul, en un sombre monologue, ou se confiait à des personnes qui le questionnaient sur son bras. Il fit un récit circonstancié du meurtre, de l'arrestation et de l'exécution de Ratran Hami, donnant avec réalisme d'abondants détails (...). Selon la mère de Wijeratne, il racontait ses souvenirs par bribes. Elle ne releva pas de circonstances extérieures qui pussent susciter ses récits sur la vie de Ratran Hami.


Méthodologie et quelques cas

Depuis le début des années soixante Ian Stevenson a rassemblé avec toute une équipe de contacts partout sur la planète de nombreux témoignages en faveur de l'hypothèse de la réincarnation. Des enfants conservent et expriment pendant un certain temps des souvenirs d'un vécu antérieur.

Stevenson considère ces cas comme suggérant la réincarnation, rien de plus. Sa conclusion est la nécessité d'approfondir l'étude de cas analogues. Les cas présentés dans ses ouvrages ne constituent qu'un mince échantillon d'une collection de plus de deux mille cas.


Le nombre des cas de réincarnation est plus élevé dans certains pays : Inde, Sri Lanka, Birmanie, Brésil, Alaska, Liban... tiendrait surtout de ce que les récits des enfants y sont mieux tolérés.

Stevenson rejette toute possibilité de fraude; en vertu de la mise en scène qu'aurait imposé la concordance de très nombreux témoignages et du fait de l'absence d'un mobile qui justifierait l'intérêt d'une telle fraude.

Les caractéristiques des cas recueillis se fondent sur sept critères de classement :
désir de retrouver l'ancienne famille,
affirmation répétée d'une autre identité,
habitudes, comportements, réactions similaires à celles du défunt,
malformations congénitales ou marques de naissance,
talents, aptitudes insolites, connaissances particulières,
connaissances historiques, érudition,
reconnaissance de lieux ou de gens.

Certains réincarnés interrogés par Stevenson disaient bénéficier de talents caractéristiques d'une prétendue personnalité antérieure. Ce que confirmaient les familiers en précisant que ces talents évoquaient indéniablement un trait spécifique de la personnalité d'un proche défunt.

Trait singulier quelquefois comme pour ce petit brésilien féru de couture, Paulo Lorentz, qui présentait lui aussi cette inversion de sexe estimée peu fréquente par Stevenson. La personnalité réincarnée en Paulo était l'une de ses soeurs, la défunte Emilia. Celle-ci, particulièrement douée pour la couture l'avait pratiquée avec génie. Après son décès aucune de ses quatre soeurs, qui montraient un goût très modéré pour ce genre d'ouvrage, ne l'avait jamais égalée. En revanche, Paulo, leur jeune frère, outre une exceptionnelle précocité, témoignait dans ses premières années d'une dextérité comparable à celle d'Emilia : " Les témoins, nous dit Stevenson, s'accordent pour trouver extraordinaires non seulement son intérêt et ses aptitudes, mais aussi une réelle habileté naturelle. Par la suite, alors que sa personnalité commençait à gagner en virilité, son aptitude pour la couture cessa de se développer, si bien qu'arrivé à l'âge adulte il était beaucoup moins compétent que ses soeurs. Le point important à prendre en considération est la spontanéité précoce de ses dons pendant sa toute petite enfance. "

La présence d'une aptitude précoce identique à celle qu'un parent avait manifesté de son vivant est moins surprenante, bien entendu, de la part d'un enfant de même sexe. Il n'est pas rare, alors, que la virtuosité dont font preuve certains de ces enfants amène l'entourage à y répondre, en conformité avec les croyances locales, par la réincarnation ou par la re-naissance. Ainsi, en Alaska, Corliss Chotkin, prolongement supposé de la personnalité de son grand oncle Victor Vincent, Tlingit de pure souche, possédait une habileté remarquable dans la mécanique ; activité dans laquelle excellait son grand oncle. Et tout comme lui Corliss possédait l'âme d'un marin :

Victor Vincent aimait le bateau et la vie sur l'eau. (...) Il se montrait très compétent devant les bateaux et leurs machines. Corliss, lui aussi, appréciait l'eau ; il avait exprimé le souhait de parcourir le monde en bateau. Il se montra également très doué pour le maniement et les réparations de moteur. Il apprit tout seul, sans leçons, à les mettre en marche. Ce talent n'était pas hérité de son père qui ne connaissait rien aux moteurs et donc n'y touchait pas, tandis que Corliss réparait facilement un moteur cassé.

Exemple de xénoglossie (connaissance spontanée d'une autre langue)

Vers l'âge de trois ans et demi Svarnlata prétendit avoir vécu auparavant à Katni, une ville située à plusieurs centaines de kilomètres. Sa famille d'alors, à laquelle elle restait d'ailleurs très attachée par la pensée, se nommait " Pathak ".

Guidé par les affirmations de Svarnlata un enquêteur découvrit ces Pathak et vérifia quelques-unes des informations fournies par la fillette au sujet de ses " parents d'autrefois ". Ils avaient bien perdu une fille, Biya, mais c'était en 1939, dix ans avant la naissance de Svarnlata. Celle-ci se souvenait effectivement qu'après la mort de Biya, dont elle avait habité le corps, elle avait vécu une autre incarnation de 1939 à 1948. Le souvenir de cette réincarnation intermédiaire, qui précède donc sa vie actuelle dans la famille Mishra, est un fait assez rare selon Stevenson. Elle s'appelait alors Kamlesh et habitait à Sylhet, en Assam, où elle serait morte à l'âge de neuf ans.

En raison de problèmes géographiques et politiques (Sylhet se trouve maintenant au Bengladesh) aucune enquête ne put être menée sur place afin de vérifier les souvenirs de cette vie antérieure. Ce qui est fort dommage car c'est justement au cours de celle-ci que Svarnlata aurait appris les danses et les chants bengali qu'elle interprétait depuis l'âge de cinq ou six ans. La disposition qu'elle manifestait pour la danse traditionnelle du Bengale, mais aussi pour sa langue, est un fait plutôt insolite puisque les Mishra ignorent tout du bengali et des coutumes propres à cette région. Ils ont toujours vécu au Madhya Pradesh, ainsi que Svarnlata bien sûr, où l'on ne parle que l'hindi. Voici un passage dans lequel Stevenson évoque les inexplicables aptitudes de la jeune fille :

"Svarnlata chantait et dansait en même temps, l'un n'allant jamais sans l'autre. C'est comme si elle avait appris simultanément chant et danse, ne pouvant les séparer. Le professeur P. Pal le croyait. Lors d'une entrevue avec Svarnlata et sa famille en 1963, il observa " qu'elle avait des difficultés à se souvenir des mots si elle n'exécutait pas les danses. " Elle fut capable de danser et de chanter de la sorte jusqu'en 1971, date à laquelle elle accepta gracieusement de me donner une représentation. Bien qu'incapable de comprendre les paroles, je fus très impressionné par sa voix et par son talent chorégraphique. Son père qui m'accompagnait, déclara que c'était en tout point identique à sa première démonstration, bien des années auparavant. Svarnlata n'avait rien oublié ! Le professeur Pal observa la représentation de manière bien plus approfondie, puisqu'il m'écrivit que " les airs semblaient être justes et les attitudes convenables et séduisantes. " (Svarnlata rejoua trois fois pour lui afin qu'il puisse transcrire les chants).
Le professeur Pal qui est originaire du Bengale identifia ces chants comme étant du bengali et il apprit, lorsqu'il retourna chez lui au Bengale occidental, que deux d'entre eux provenaient de poèmes de Rabindranath Tagore. Le troisième chant, lui aussi sans conteste en bengali, était un poème mineur inconnu du professeur Pal."



dimanche 8 novembre 2009

Où croit-on en la réincarnation ?

Les Occidentaux pensent en général que seuls les Asiatiques croient en la réincarnation, particulièrement dans les régions du sud-est, probablement parce que les doctrines hindoues et bouddhistes ancestrales ont été traduites et publiées par des missionnaires chrétiens (en versions simplifiées dont la fiabilité laisse souvent à désirer).

Beaucoup d'autres habitants de notre planète croient en la réincarnation : Les chiites musulmans d'Asie Occidentale, tous les habitants d'Afrique occidentale ou orientale qui n'ont pas été convertis à l'Islam ou au Christianisme y croient. Une importante minorité de Brésiliens, les Indiens d'Amérique du Nord, les habitants des îles Trobrians, les tribus d'Australie centrale, les Ainus au Nord du Japon, etc..

Schopenhauer a écrit : Si un Asiatique me demandait de lui donner une définition de l'Europe, je serais forcé de lui répondre : "C'est cette partie du monde qui est complètement dominée par l'illusion incroyable et scandaleuse selon laquelle l'homme est un être sorti du néant et dont la naissance est le début absolu."

Depuis l'époque de Schopenhauer, la croyance en la réincarnation s'est diffusée en Occident. À part quelques exceptions, presque tout le monde croit à la réincarnation en dehors des orthodoxies du judaïsme, du christianisme, de l'Islam et de la science (cette dernière étant devenue une religion séculière pour beaucoup de gens !).

Qu'elle soit écrite ou orale, la transmission d'une génération à l'autre de la croyance en la réincarnation n'explique pas son point de départ, qui pourrait avoir eu lieu de plusieurs façons.

D'après Platon, Socrate parlait des connaissances accumulées d'une vie à l'autre comme d'une certitude absolue.

Des peuples n'ayant aucune tradition écrite ni de contact avec d'autres peuples croient néanmoins en la réincarnation, on peut en conclure que le concept a été acquis grâce à "ceux qui se rappellent" et le racontent, et ce, probablement dans toutes les parties du monde où la tradition existe.

Il existe autour de la croyance fondamentale une grande variété de traditions subsidiaires portant sur la question de savoir qui se réincarne, par quel processus, comment une cause produit des effets à retardements sur les vies successives, etc.

Extraits de l'ouvrage de Ian Stevenson : "Les enfants qui se souviennent de leurs vies antérieures."

Ian Stevenson


Le plus grand spécialiste mondial en matière de réincarnation est sans nul doute le professeur lan Stevenson (1918-2007). Canadien d'origine, il vivait aux États-Unis où il a enseigné la psychiatrie à l'Université de Virginie.

Il a publié ses recherches dans plusieurs ouvrages dont trois traduits en français sur des enfants alléguant se souvenir d'une vie précédente et donnant des éléments permettant de retrouver des traces de cette vie précédente.

Ces témoignages de réincarnation ne se limitent pas à l'Asie et d'ailleurs la croyance en la réincarnation est plus répandue qu'on ne le croit (Liban, Alaska, par exemple). Stevenson a même trouvé des cas en Occident, dans un environnement qui ne croyait pas à la réincarnation.

Stevenson a par ailleurs étudié des cas de phobies (par exemple la peur de l'eau) se manifestant chez les enfants très jeunes. Ainsi, des enfants ayant refusé de se baigner dès leur plus jeune âge, lui ont affirmé, dès qu'ils purent parler, être morts noyés.

Il a également travaillé sur les traces de naissance apparaissant sur l'épiderme de bébés: grains de beauté, zones de peau sans pigmentation ou sans pilosité. Il a constaté qu'un tiers des enfants disant se souvenir d'une vie antérieure sont porteurs de traces de naissance qu'ils affirment être des blessures reçues lors de leur vie précédente.

Stevenson a pu vérifier le dossier médical des personnes mortes dont les enfants disaient être la réincarnation : dans 20% des cas, il a découvert une concordance parfaite entre les traces de naissance et les blessures.

Toute l'approche de Stevenson obéit à des critères de vérification les plus rigoureux, c'est pourquoi on peut dire que l'on est passé d'une croyance présente chez de nombreux peuples du monde à une démarche scientifique de collecte de faits inexplicables sans l'hypothèse d'une transmission de souvenirs entre deux identités corporelles différentes.

Néanmoins, se rappeler d'une vie antérieure reste un phénomène rare.




samedi 31 octobre 2009

L'idée de cesser d'être

L'idée de cesser d'être est odieuse et affreusement pénible à tout individu. De toutes ses forces, si basse que soit sa place dans l'échelle des êtres, il tend à durer longtemps, indéfiniment, éternellement.
Le problème de la pérennité est intimement liée à celui du "Moi".

C'est évidemment, l'idée que l'on se fait de la nature du "Moi", la manière dont on se le représente mentalement qui dicte les conceptions que l'on élabore quant aux mode de durée susceptibles de lui être applicables.

Demandez à un individu quelconque : "Tu souhaites subsister après la mort, tu crois peut-être que tu subsisteras ? Mais qu'est en réalité, cela dont tu désires la durée ; qu'est cela qui, selon toi, persisteras après la mort ?"

Il est probable que votre interlocuteur trouvera ces questions absurdes ou, du moins, qu'un grand nombre de ceux à qui vous les poserez les jugeront saugrenues. La réponse n'est-elle pas toute simple ?
"C'est ma durée que je souhaite", ou "c'est moi qui continuerai à exister" répondront les interpellés, suivant leurs convictions religieuses ou philosophiques.

"Ta durée ? - qui es-tu, toi ? - en quoi consistes-tu ? Quand tu dis : c'est moi qui aspire à subsister, qu'est-ce que ce Moi ?

Pour la majorité des Occidentaux, soit qu'ils s'en tiennent à la définition des catéchismes : "L'être humain est composé d'un corps mortel et d'une âme immortelle" ou à des définitions analogues établissant une division bien tranchée entre esprit et matière, il n'y a pas là sujet à discussion. C'est le principe immatériel : l'âme qui subsiste tandis que le corps est détruit.

Il n'en va pas de même chez les peuples imbus de notions différentes quant à la constitution de leur personne.

Cependant, en tous lieux, les faits s'imposent à l'être humain, la constatation du caractère transitoire de tout ce qui l'entoure, mais cette constatation, qui lui est pénible, n'entame pas son désir inné d'immortalité. Il s'y obstine, créant des mythes, des doctrines et des pratiques, tous tendant à le réconforter, à le confirmer dans la foi qu'il chérit en son immortalité.

Alexandra David-Neel - Immortalité et réincarnation